Draguignan Un Mois à la campagne de Ivan Tourgueniev
Théâtres en Dracénie a eu le bon goût de choisir cette splendide pièce de Tourgueniev mise en scène par Clément Hervieu-Léger sociétaire de la troupe de la Comédie Française. Un chef d’œuvre doux amer qui honore la grande culture russe de la part d’un écrivain qui fut entr’autre un grand ami de la France en son temps. Le 7 février 20h30 Théâtre de l’Esplanade de Draguignan. À Conseiller.
Un grand classique russe
La pièce a été écrite entre 1848 et 1850, sous le titre original L’étudiant en référence au personnage du jeune personnage Belyaev. Elle fut écrite en France et publiée finalement sous le titre de Deux femmes en 1855 car Tourgueniev parlait couramment le français. Il faudra attendre 1872 pour que la pièce soit créée à Moscou. Elle connait le succès en 1879 à Saint-Pétersbourg.
C’est la pièce la plus célèbre de Tourgueniev, qui « repose sur les méandres les plus subtils de l’expérience amoureuse », notait Stanislavski. Une comédie de mœurs, avec des aspects sociaux, historiques et psychologiques, très moderne aussi par l’usage de l’expression symbolique et du monologue intérieur des personnages. Elle a été jouée en particulier par les grands noms du théâtre notamment le rôle principal féminin par Ingrid Bergman dans les années 1960 et Isabelle Huppert dans les années 1980.
Un thème éternel les mystères de l’amour
Natalia Petrovna s’ennuie auprès de son mari. Elle aspire sans trop le savoir à vivre une passion amoureuse. Elle engage un jeune étudiant, Alexeï Belyaev, comme précepteur qu’elle installe dans la maison. Inconscient de son charme naturel, le beau jeune homme fait battre le cœur de Vera, la jeune pupille de Natalia
Natalia est troublée par cet amour sincère qu’elle voit se développer entre les deux jeunes gens. Amoureuse elle aussi du bel étudiant, elle incite Vera à épouser un vieux et riche prétendant qui assurerait à la jeune fille désargentée à la fois fortune et belle position dans le monde. En fait Natalia voulait surtout écarter sa jeune rivale. Pour se décharger de ses remords, elle confesse sans calcul sa faute au jeune homme qui, au lieu d’en être choqué, est séduit. Dès lors, la situation devient cruelle. La jeune Vera, blessée par l’attitude d’Alexeï, annonce qu’elle épousera le vieux soupirant. Alexeï, bouleversé dans ses sentiments et dépassé par le désordre amoureux qu’il a causé, comme dans le film Théorème de Pasolini, décide de partir. Ainsi prend fin son mois à la campagne.
Une mise en scène d’une grande clarté
Après le succès de la pièce de Goldoni Une des dernières soirées de carnaval, Clément Hervieu-Léger invite à passer un mois à la campagne en compagnie d’Ivan Tourgueniev et les comédiens de la Compagnie des Petits Champs. Clément Hervieu Léger dit : « Tout semble calme dans cette campagne russe du XIXe siècle, maris, femmes, amants en routine réglée, quand un fougueux jeune homme vient perturber ce bel agencement : Alexeï, le précepteur venu de Moscou que Natalia Petrovna a engagé pour s’occuper du petit Kolia, va mettre le microcosme local à feu et à sang.
Proche du théâtre de Tchekhov, ce joyau de Tourgueniev, loué pour sa modernité et sa finesse psychologique, devient aussi une critique du servage et des propriétaire. Car, par-delà les chassés-croisés amoureux, c’est l’ordre établi qui est aussi attaqué, et nul doute que Natalia, dans sa rivalité avec Vera, sa protégée orpheline, pour s’emparer du cœur du précepteur, exerce aussi une mainmise de classe. »
Il utilise la belle traduction de Michel Vinaver, qui donne un sérieux coup de fouet, et de jeune, à la pièce. La mise en scène d’une grande clarté très dépouillée, dans les costumes comme dans l’articulation de certaines séquences, penche plus du côté du cinéma italien de la seconde moitié du XXe siècle que de la Russie de la fin du XIXe, le metteur en scène en profite pour vivifier les tourments amoureux et existentiels décrits par Tourgueniev.
Il faut donc se précipiter à Draguignan pour voir ce petit chef d’œuvre de la littérature russe.
Un mois à la campagne mardi 7 février 20h30 Grande scène Théâtre de l’Esplanade Bd Georges Clemenceau, Tarif Plein 26€ | Réduit 16€ Carte Saison 12€ et 19€ tel 04 94 50 59 59