Que la guerre est douce dans South Pacific
Création française réussie de la comédie musicale South Pacific de Rodgers à l’Opéra de Toulon.
Attendue, annoncée, reportée, reprogrammée et finalement créée cette saison, l’œuvre sera donnée trois fois, les 25, 26 et 27 mars. Lors de la générale le 24, devant une salle enthousiaste de jeunes, d’invités du Club Orfeo et de la presse on a pu découvrir cette comédie musicale jamais jouée en France. Un beau travail qui honore la scène varoise.
Succès public
La soirée a été un succès public et l’accueil fut très chaleureux malgré quelques défections après l’entracte. Trois raisons expliquent la satisfaction. D’abord le soin apporté à la production d’Oliver Bénézech, talentueux metteur en scène, vieux briscard de la comédie musicale, parfaitement à l’aise dans cette esthétique. Ensuite le rythme chorégraphique imprimé par Johan Nus. Enfin des décors à minima mais avec des intentions efficaces, bien mis en lumière sans tomber dans le clinquant.
Distribution homogène
Distribution au-dessus de tout soupçon, très homogène avec des personnalités scéniques attachantes d’un professionnalisme évident. Direction musicale Larry Blank, spécialiste du genre, chorégraphie Johan Nus, avec des chanteurs-danseurs-comédiens complets Frédéric Olivier, Kelly Mathieson, Jasmine Roy, William Michals, Mike Schwitter, Thomas Boutilier, Scott Emerson, Sinan Bertrand. Luc Londiveau et Marc-Antoine Vellutini de l’Opéra de Toulon se sont bien intégrés à la joyeuse équipe, apportant la touche nécessaire au succès collectif.
Choix assumé
En choisissant cette comédie musicale un peu oubliée (1948) l’Opéra de Toulon a assumé avec brio la gageure. Reconnaissons que l’œuvre souffre d’une dramaturgie mal exportable, surtout en ce moment. Peut-on chanter et danser sur la guerre ? En deuxième partie quelques scènes parlées en américain entre le QG et la zone des combats apparaissent un peu longues. La caractérisation des personnages est un peu rudimentaire. Entre-t-on vraiment dans cette double histoire d’amour de garnison sous le ciel des tropiques ? Le ton est à la fois grandiloquent et fleur bleue.
Charme mélodique
Mais c’est surtout le style musical qui semble un peu dépassé malgré l’habileté des lyrics et le charme de certaines mélodies, orchestrées très cuivrées par Russel Bennet. On comprend ainsi l’importance de la sonorisation des interprètes avec micro-cravate. L’équilibre entre les voix et l’orchestre a été bien respecté. Monsieur William Michals à la belle voix de baryton dans le rôle central d’Emile De Becque faisait figure de guest-star. C’est lui le héros qui revient de la guerre et assure le lieto fine chantant avec les deux enfants la petite comptine du début. Il tend la main à la jolie infirmière qui a dépassé ses préjugés « Dites-moi pourquoi la vie est belle ? Parce que vous m’aimez. ». On aimerait bien y croire.
Jean François Principiano