Lors de la présentation de la soirée musicale intitulée Ennéade nous transcrivions les intentions louables qui devaient présider à ce concert Schoenberg, Phill Glass, Labelle.
Ce dernier dans sa profession de foi évoquait ses rencontres, ses intentions, ses inspirations.
Hier soir le résultat concret fut malheureusement décevant.
Schoenberg en exergue, Philip Glass au piano La première partie s’ouvrit avec La Nuit Transfigurée de Schoenberg dans la transcription pour orchestre de chambre de William Goutfreind sous la direction de Simon Proust.
La Nuit transfigurée est une page bouleversante écrite en 1899 pour celle dont le jeune compositeur était amoureux et qui deviendra son épouse par la suite : Mathilde Von Zemlinsky (sœur du compositeur Alexandre Zemlinsky, qui fut le professeur et le mentor de Schoenberg). Ils auront deux enfants, Gertrud et Georg. (La vraie version plus en finesse expressive est pour sextuor à cordes). Cette œuvre de jeunesse, a été écrite bien avant sa période dodécaphonique, avec des accents de romantisme tardif. On y perçoit principalement l’influence de Wagner et de Brahms, certains enchaînements harmoniques évoquant fortement Tristan et ses accords de neuvième sans fondamentale. Cette belle musique inspirée et poétique a été bien rendue par les cordes de l’Orchestre de Toulon sous la direction d’un jeune chef d’orchestre attentif et précis.
Les Trois Etudes 7, 8 et 9 de Philip Glass, sous les doigts experts de Vanessa Wagner ont été également une belle découverte de ce maître, l’un des représentants les plus éminents de la musique minimaliste, notamment de l’école répétitive américaine.
L’Événement attendu. En deuxième partie l’œuvre de Labelle mérite que l’on s’y attarde un peu puisque c’était l’événement attendu. On ne peut nier le côté sympathique de l’idée de base du métissage entre la musique traditionnelle réunionnaise, le maloya et la formation classique.
C’est une tentative qui a porté ses fruits dans des mains heureuses, chez Ravel, Bartok, Kodaly ou Gershwin. De même que l’utilisation de l’appareillage électronique, un peu moins démagogique certes, chez Xenakis, Messiaen, Grisey, Dufour ou Nono… Dans le cas de Ennéade de Labelle on s’aperçoit vite que cette synthèse n’est en fait qu’une juxtaposition plaquée artificiellement, sans développement organique ni qualité d’écriture. L’orchestre de Toulon est désormais habitué à une musique plus musclée que ces quelques cellules harmoniques ou rythmiques naïves répétées ostinato.
Instants de Poésie Quelques instants de poésie authentique bien venus grâce aux percussionnistes Tom Leichnig et Hadrien Santos da Silva n’ont pu sauver le reste d’une œuvre rhétorique et boursouflée, aux titres galactiques et cosmiques servant d’habillage au vide. Mais le vide est difficile à meubler lorsque l’inspiration est aussi pauvre. L’accueil du public est resté poli devant ce déploiement de moyens aboutissant à un résultat somme toute bien modeste. Souhaitons à ce jeune compositeur qui est aussi un DJ reconnu et un charmant garçon de rencontrer un jour l’inspiration et la force de dépassement le libérant des ornières de la facilité.