Toulon : Juan Carmona en concert
entre flamenco et musique arabo andalouse
Le guitariste Juan Carmona, spécialiste de la guitare flamenca propose un retour aux sources et à la tradition en rendant hommage au poète, musicien Abu Al-Hassan Ali ibn Nafi, dit Zyriab, né à Mossoul en 789 et mort à Cordoue en 857. Le 10 mars 20h30 au Théâtre Liberté de Toulon.
Cette nouvelle création suivra les traces du poète, par de nombreuses escales musicales autour de la Méditerranée, le guitariste retracera le voyage de la musique arabo andalouse en une soirée à la fois festive et intimiste. Ce sera également la découverte de plusieurs instruments dont un superbe oud classique. Pour tous les mélomanes c’est une soirée à ne pas manquer.
Qui était Zyriab ?
À l’âge de douze ans, Ziryab savait déjà chanter à merveille et jouer de l’oud. À 19 ans, il améliora cet instrument d’origine, en lui ajoutant une cinquième corde et des barrettes. Ce luth à 5 cordes, à manche court, sans touche, à la caisse en forme d’amande fut considéré dans tout l’Orient comme le roi des instruments de la musique savante. Son talent et son succès étaient si grands qu’ils suscitèrent la jalousie de ses confrères.
Une vie d’errance
Après un long voyage dans toute la méditerranée orientale il se fixe à Cordoue en Espagne. À son arrivée à Cordoue, il créa une école de musique, premier conservatoire d’Europe ouvert à tous, financé par la cassette du calife. Chanteur, il mit au point les techniques poétiques et vocales tel le chant el s’agal qui donna naissance au flamenco. Compositeur, il créa un millier de poèmes mélodiques qui seront joués et chantés en Andalousie et dans tout le bassin méditerranéen.
Inventeur de la Nouba andalouse
C’est Ziryab qui introduit à la cour le système des noubas, fondement de la tradition musicale andalouse. Nouba veut dire « chacun à son tour ». Chaque musicien, en effet, attendait son tour pour chanter devant le calife. Indissociable de la danse, la nouba est une suite de pièces vocales et instrumentales dont le nombre de mouvement et de pièces, basé sur les modes, s’est enrichi au fil des siècles. Ziryab introduisit dans les chœurs de la nouba des « des chanteurs n’ayant pas mué », comme les castrats dont la voix charmera les mélomanes jusqu’à Rome, dans la chapelle pontificale.
Le point faible d’un grand créateur : l’absence de partition écrite
Le drame pour l’histoire de la musique c’est que nous n’avons aucun manuscrit authentique de cette esthétique musicale. On a des témoignages littéraires qui nous disent qu’en technicien précis, Ziryab codifia le chant, limitant les improvisations. Pédagogue, qu’il fit travailler ses élèves en les initiant à la pratique des vocalises. Mais on n’a aucune partitions, étant donné que dans ce contexte précis historique toute la transmission se faisait oralement de maître à élève.
Musicien extraordinaire, on dit qu’il explorera et tentera d’assimiler les musiques du Nord, les romanceros profanes, les musiques religieuses chrétiennes comme le chant grégorien qu’il transposera en partie dans le malouf le cérémonial de cour.
Grâce à sa prodigieuse mémoire, c’est par lui que des milliers de chansons orientales de lointaine origine gréco-persane entrèrent en Andalousie. Ces élèves tentèrent de l’imiter avec des fortunes diverses.
Sur le plan littéraire Ziryab se révéla aussi un fin lettré, un poète qui perfectionna le sawfi, le subtil poème arabe classique et il fut sans doute un conteur intarissable.
Juan Carmona guitare au poing
En tournée avec ses musiciens à travers le monde (États-Unis, Chine, Canada…), ses albums Alchemya, Orillas, Sinfonia Flamenca et El Sentido del Aire ont été nominés aux Latin Grammy Awards catégorie « Meilleur Album Flamenco de l’année ». Lauréat du Grand Prix Charles Cros 2015, l’Unesco lui décerne également le Grand Prix Zyriab des Virtuoses. Son nouvel opus Zyriab 6.7 (sortie le 12 novembre 2021) retrace le voyage du musicien poète Zyriab avec un casting d’exception, faisant escale le long de la Méditerranée, d’oasis en caravansérails. Chaque escale est une invitation musicale avec un artiste emblématique.
Au croisement entre modernité musicale et traditions flamencas les plus anciennes et les plus vivantes d’Andalousie, Juan Carmona est un artiste généreux et attachant qui a enflammé les soirées d’été de Châteauvallon, faisant découvrir la culture du flamenco (inscrite au patrimoine de l’humanité) On s’en souvient !
Vendredi 10 Mars Juan Carmona Zyriab 6.7 Salle Albert Camus Théâtre Liberté Toulon 29 et 21€
Infos : 04 98 00 56 76