L’émigration Italienne, une immigration heureuse ?
Mardi 22 mars 17h 45 au Relais Peiresc « L’Émigration italienne dans le Var » conférence historique illustrée par Jean François Principiano.
37 % de la population varoise a au moins un ancêtre d’origine italienne. C’est un des résultats de plusieurs décennies d’émigration notamment piémontaise et napolitaine entre 1880 et 1950. Alors que la question migratoire s’invite dans la campagne présidentielle, il est peut être bon de revisiter objectivement, du point de vue historique, un des événements démographiques marquant pour les deux pays, la France et l’Italie et notamment pour la Provence et le Var.
Une émigration de proximité
Il est indéniable que les Italiens ont écrit les pages les plus nombreuses et les plus importantes de l’histoire de l’immigration dans la région et même, par la force de leur présence et de leur action, de l’histoire de la région en général ; pour beaucoup, Français comme Italiens, la frontière est apparue comme une barrière absurde, tant le sort d’une partie importante de la région fut intrinsèquement lié au sort de l’Italie.
Bûcherons, charpentiers, maçons, domestiques, cordonniers, agriculteurs, pêcheurs les italiens ont marqué de leur empreinte les village du Var. Principalement héritiers des migrations saisonnières transfrontalières de nature agricole, ils s’illustrèrent dans différents secteurs ainsi que dans diverses activités de l’artisanat et des services.
Une frontière perméable
La frontière des alpes semble en fait scinder artificiellement une zone soudée par plus de points communs que de différences. Frontière, parfois ignorée, d’autant qu’elle s’est révélée perméable en de nombreux points, sans compter qu’elle n’est parfois tout simplement pas indiquée, notamment dans les zones de haute montagne.
Aussi, la Provence peut apparaître comme une simple marge de l’Italie.
L’étude des recensements
En 1911, sur 132 469 étrangers dans les Bouches-du-Rhône, pas moins de 114 635 viennent d’Italie, soit 86 % ; dans les Alpes-Maritimes, 87 556 des 118 842 étrangers sont italiens, soit près de 74 %. Les autres départements ne sont pas en reste : dans les Hautes-Alpes, le rapport s’élève à 3 212 sur 3 409, ce qui porte la proportion à 94 %, les Basses-Alpes offrant des chiffres avoisinants. Si elle subit un fléchissement au fil du temps, la proportion d’Italiens, dans la population étrangère totale, reste forte et dominante. Au recensement de 1946, la nationalité italienne est la première indiquée et compte encore pour 75 % de l’immigration dans le Var.
Une émigration heureuse ?
La spécificité de l’émigration italienne est la facilité avec laquelle l’italien, dans son inconscient, est passé d’une déstructuration culturelle, la perte de l’italianité entachée à la fois du souvenir d’appartenance à un pays culturel et au déni de la pauvreté, à une restructuration culturelle et identitaire en acceptant la culture française.
Cela a été rendu possible par le fait que le cœur du mouvement migratoire a été un mouvement de célibataires qui fondèrent très facilement famille en Provence et notamment dans le Var (similitude religieuse, proximité linguistique, positivasion de la guerre de 14-18 en tant que pays alliés).
L’Accueil en Provence
L’accueil des Français et des provençaux fut inégal. D’abord indifférent, il devint hostile dans un contexte de crise économique et de nationalisme exacerbé après la défaite de 1871.
La violence xénophobe finit par s’exprimer par des émeutes anti-italiennes en 1881 à Marseille (5 morts) et en 1894 (après l’assassinat du président Carnot par un anarchiste italien, Caserio) ; elle culmina à la Seyne sur mer en 1891 (10 morts) et à Aigues-Mortes en 1893 (13 morts).
Plus tard, entre les deux guerres, se développa l’usage des termes méprisants de « macaroni », « pipi », « babi » ou « ritals ».
Malgré tout l’intégration* se fit assez rapidement. Pourquoi ? Même religion, même origine, même fond linguistique, facilitèrent les mariages. Peut-on vraiment parler pour autant d’une émigration heureuse ?
Les différentes facettes de ce vaste mouvement migratoire seront évoquées à partir des études démographiques les plus récentes.
« L’émigration italienne dans le Var » par Jean François Principiano mardi 22 mars 17h45 Relais Peiresc, entrée libre par le Collège Peiresc boulevard de Strasbourg sur inscriptions au 09 51 06 66 20 ou 07 82 14 62 08 de 9h à 12h et de 16h à 19h.
* « En sociologie, l’intégration est le processus ethnologique qui permet à une personne ou à un groupe de personnes de se rapprocher et de devenir membre d’un autre groupe plus vaste par l’adoption de ses valeurs et des normes de son système social. L’intégration nécessite deux conditions :
– une volonté et une démarche individuelles de s’insérer et de s’adapter, c’est-à-dire l’intégrabilité de la personne,
– la capacité intégratrice de la société par le respect des différences et des particularités de l’individu venu d’ailleurs. »