Opéra de Toulon La Périchole d’Offenbach pour les fêtes
Grand choix pour la fin d’année avec cette Périchole dans une distribution qui s’annonce brillante, la direction musicale de Laurent Campellone à la tête de l’orchestre et les chœurs de l’Opéra de Toulon et une mise en scène moderne irrésistible de Laurent Pelly (réalisée par Paul Higgins). C’est la mezzo-soprano Antoinette Dennefeld qui incarnera cette héroïque incandescente aux côtés du ténor Frédéric Talbot et du baryton Alexandre Duhamel.
Inspiré de loin d’une pièce de Prosper Mérimée, Le Carrosse du Saint Sacrement (1828) et d’événements historiques, l’opéra fut représenté pour la première fois le 6 octobre 1868 à Paris, au Théâtre des Variétés dans une première version en deux actes puis dans sa version définitive en trois actes, le 25 avril 1874.
L’œuvre idéale pour les fêtes évoque la vie et les amours d’un couple de chanteurs des rues à la cour du Vice-roi de Lima au Pérou. Tendrement nostalgique ou franchement comique cette partition d’Offenbach est considérée comme un des plus beaux témoignages de l’Opérette classique française. A ne pas manquer les 28,30 et 31 décembre.
Une nouvelle de Prosper Mérimée (1803-1870)
Prosper Mérimée avait publié en 1828 un recueil de petites pièces, intitulé Théâtre de Clara Gazul. L’une d’elles, « Le carrosse du Saint-Sacrement », met en scène une comédienne fameuse de Lima, la Périchole. Cette actrice a reçu de son amant, le vice-roi du Pérou, un magnifique carrosse avec lequel elle se rend à l’église, ce qui scandalise toute la population. Peu après, la jeune femme, pour apaiser les esprits fait don du carrosse à la cathédrale pour le transport du Saint-Sacrement.
Jacques Offenbach (1819-1890) le petit Mozart des Champs Elysées
Jacob Offenbach est né à Cologne (Allemagne) en 1819 dans une modeste famille juive, qui doit la citoyenneté à Napoléon. En effet son père, Isaac Juda Eberst, avait en 1800 quitté sa ville natale d’Offenbach sur le Main pour s’installer à Cologne, ville faisant alors partie de la Confédération du Rhin, état satellite de l’Empire où il adopta comme nom de famille Der Offenbacher, puis simplement Offenbach, la loi française obligeant les juifs à avoir un patronyme stable en contrepartie de la citoyenneté.
Jacques Offenbach son dernier fils manifeste très jeune des dons pour la musique et le violoncelle. Son père l’envoie poursuivre ses études musicales à Paris. À 14 ans, il est admis en classe de violoncelle du Conservatoire et débute sa carrière de soliste virtuose très rapidement.
En 1855, il ouvre son théâtre, les Bouffes-Parisiens, afin d’y représenter ses propres œuvres avec la bénédiction de Napoléon III qui sera un de ses grands admirateurs.
Influencé par Rossini et Mozart, il invente l’opéra-bouffe français à l’humour débridé et à la satire mordante, avec la complicité des excellents librettistes Henri Meilhac et Ludovic Halévy.
Entre 1858 et 1869, Orphée aux Enfers (1858), La Belle Hélène (1864), Barbe-Bleue (1866), La Vie parisienne (1866), La Grande-Duchesse de Gerolstein (1867), La Périchole (1868) ou encore Les Brigands (1869) font les beaux soirs du Théâtre des Variétés et la célébrité du compositeur en enthousiasmant le public du Second Empire, avide de plaisirs et de dérision.
Après la chute du Second Empire les Parisiens de la Troisième République se montrent moins favorables à ce genre et Offenbach se tourne alors vers la féerie, tout en se consacrant à son testament musical, Les Contes d’Hoffmann, qui sera créé quelques mois après sa mort (1880). Il est enterré au cimetière de Montmartre. Son tombeau a été réalisé par Charles Garnier, l’architecte de l’Opéra de Paris.
Le rocambolesque livret de la Périchole
À Lima, le vice-roi du Pérou représentant le pouvoir colonisateur, sort s’encanailler incognito – croit-il – en se mêlant au bon peuple. Deux chanteurs des rues, la Périchole et son amant Piquillo n’ont guère de succès, même pas l’argent pour se marier. Alors que Piquillo s’éloigne, la Périchole s’endort pour tromper sa faim. Le vice-roi, subjugué par sa beauté, lui propose de devenir dame d’honneur au palais. La Périchole n’est pas dupe mais au comble de la faim, elle accepte et rédige une lettre d’adieu à Piquillo. Le malheureux, désespéré, veut se pendre. Heureux hasard, il est sauvé par le premier gentilhomme de la cour qui cherche un mari à la future favorite du vice-roi pour sauver les apparences. Après avoir été rassasiés l’un et l’autre d’un repas très arrosé, le mariage est célébré, sans que Piquillo n’ait réalisé l’identité de son épouse…Lorsqu’il comprend la situation et se révolte il est emprisonné dans le cachot des maris récalcitrants.
Quelques temps après, la Périchole vient visiter Piquillo en prison. Après un mouvement d’humeur de sa part, elle l’informe qu’elle n’a pas cédé aux avances du vice-roi, et qu’elle va corrompre le geôlier pour le faire évader. Celui-ci se présente mais n’est autre que le vice-roi déguisé, qui les fait enfermer tous les deux. Un vieux prisonnier les fait évader par le tunnel qu’il a creusé.
Les trois évadés se retrouvent en ville, mais sont identifiés par une patrouille qui les conduit devant Don Andrès. La Périchole et Piquillo chantent leurs malheurs, ce qui attendrit le vice-roi. Magnanime, il les laisse partir se marier et avoir des enfants qui grandiront, car ils sont espagnols…
Les caractéristiques de l’œuvre
Le personnage de La Périchole aurait réellement existé ; elle se nommait Micaëla Villegas et vivait au XVIIIe siècle. Un jour qu’elle avait été impertinente avec le vice-roi du Pérou, son amant, ce dernier l’aurait traité de « Perra chola » (chienne d’indigène), expression qui serait à l’origine de son surnom.
Le sens de l’œuvre
Il y a dans La Périchole un petit parfum d’humour juif mêlé à la satire politique dans un Pérou reconstruit par la fiction. Pour le public européen, ce côté parodique faisait écho avec une ironie malicieuse aux fausses notes du règne de Napoléon III à la fois autoritaire, populaire et nationaliste.
La Périchole hésite et balance entre rire et mélancolie, gravité et burlesque dans un onirisme qui se joue des dissonances du réel. Son humour agit sur le public comme un désinfectant idéologique. On pense alors à Groucho Marx, lorsque Offenbach met en musique l’outrance infantile et l’équilibre maladroit d’un pouvoir chancelant et que le chœur populaire chante malicieusement : « C’est lui, c’est notre vice-roi, nous le reconnaissons très bien mais il faut qu’il n’en sache rien… »
Entre les notes dansantes d’Offenbach, la Périchole se faufile dans les décalages burlesques et tragiques qui existent entre amour, société et réalités contraignantes du pouvoir.
Il y a dans cette musique follement humaine, un insatiable besoin d’aimer et d’être aimé qui se décline avec toutes les tonalités possibles : désir, tendresse, passion, rejet, affection… De la tragédie intime de « La Lettre » à la comédie grotesquement ambiguë du « rondo des maris récalcitrants », l’œuvre n’échappe à aucun sentiment, aucun fantasme, aucune fantaisie pour le bonheur du spectateur.
Offenbach avait comme profession de foi : « J’ai du succès parce que je suis le miroir des sentiments du public. » Malheureusement pour lui, après la guerre de 1870 le reflet qu’il renvoie au public est en décalage avec le dolorisme de la France vaincue. L’œuvre qui a été applaudie en 1868 fut boudée en 1875.Offenbach en fut personnellement affecté et dépensera toute son énergie pour (re)faire sourire les Français mais le cœur n’y était plus. Il se tournera in extrémis vers le grand Opéra avec les Contes d’Hoffmann qu’il ne pourra même pas achever. Rongé par le diabète il dictera ses dernières volontés à un petit cercle d’artistes « les seuls qui m’ont compris ».
La distribution de l’Opéra de Toulon
Direction musicale Laurent Campellone Mise en scène et costumes Laurent Pelly Réalisation de la mise en scène Paul Higgins Adaptation des dialogues Agathe Mélinand Scénographie Chantal Thomas Lumières Michel Le Borgne Réalisation des Lumières Sarah Eger Collaboration aux costumes Jean-Jacques Delmotte.
Co-production Théâtre des Champs-Élysées, Opéra de Toulon, Opéra Royal de Wallonie, Théâtre de Berne, Opéra de Dijon et Palazzetto Bru Zane.
La Périchole Antoinette Dennefeld, Guadalena/Manuelita Chloé Briot Berginella/Ninetta Alix Le Saux Mastrilla Brambilla Valentine Lemercier Frasquinella Nathalie Perez Piquillo Philippe Talbot Don Andrès de Ribeira Alexandre Duhamel Don Miguel de Panatellas Rodolphe Briand Don Pedro de Hinoyosa Lionel Lhote Marquis de Tarapote Eddy Letexier.
Opéra de Toulon Provence Méditerranée Boulevard de Strasbourg 83000 Toulon
Tél. 04 94 93 03 76 billetterie@operadetoulon.fr